Comment tirer profit des sites web d’intermédiation ?
Dans le cadre de la prospection commerciale traditionnelle et du bouche-à-oreille, le développement des plateformes d'intermédiation bouscule le secteur du bâtiment. Elles possèdent malgré tout un intérêt certain dans l'apport de nouveaux clients, à condition de bien les choisir.

« Trouvez de nouveaux chantiers dans votre région », « accélérez votre activité commerciale », « remplissez vos carnets de commandes ». Les promesses des plateformes de devis entre artisans et parti­culiers apparaissent souvent comme alléchantes et rivalisent de slogans pour séduire les professionnels, tentés par la perspective d’obtenir de nouveaux clients.

Si Internet se positionne, en effet, comme le second canal d’information des clients après le bouche-à-oreille, selon une étude de la FFB et de ­l’­Obsoco (2017), disposer d’un site internet ou d’une présence sur les réseaux sociaux se révèle aujourd’hui incontournable pour assurer la visibilité de son entreprise. Néanmoins, les sites d’intermédiation sont également des apporteurs d’affaires non négligeables.

« Les plateformes viennent en complément de la recommandation des clients« , avance Vasily Osenin, artisan à Paris. À la tête d’une TPE de rénovation de deux salariés, il utilise ce service uniquement en période creuse. Les chantiers obtenus depuis la plateforme constituent environ 15 % de son activité, aujourd’hui. « Je ne fais appel à eux que lorsque j’ai des trous de deux à trois semaines dans mes plannings« , concède-t-il. « Nous n’avons pas vocation à porter 100 % du business d’une entreprise« , rebondit Olivier Waldin, directeur général d’Homly You, qui pointe le risque de dépendance qu’aurait une telle exclusivité pour un artisan.

Qualifier la demande

Si certains professionnels se satisfont des avantages obtenus et de la flexibilité du service, la tendance n’est toutefois pas homogène. Alors que leur nombre a bondi, ces dernières années – près de 150 sont recensées -, l’offre proposée aux artisans s’apprécie diversement. « Il y a deux types de plateformes« , réagit Solenne Xavier, cofondatrice du site d’intermédiation Allomarcel.com, laquelle distingue les sites envoyant les demandes de devis de particuliers à de nombreux artisans et ceux qui requalifient les demandes avant de les proposer aux artisans affiliés. « C’est la différence entre ces plateformes qui ne font pas de tri et celles qui proposent un service ajouté à la fois au professionnel et au client, en requalifiant les demandes.« 

Une direction également prise par la plateforme Homly You, une marque de Saint-Gobain. « 50 % des demandes que l’on reçoit ne sont pas transmises aux artisans puisqu’elles sont traitées par nos services et concernent plutôt des démarches administratives ou des demandes de prix. Sur la moitié restante, diffusée aux artisans, le taux de conversion s’établit entre 80 et 90 %« , fait savoir Olivier Waldin, indiquant néanmoins que l’argumentaire commercial des artisans influe sur la transformation des demandes de devis en mises en chantier.

Choisir sa plateforme

Adhérer à une plateforme suppose néanmoins de s’informer en amont des conditions contractuelles et du prix. « Le coût d’accès aux plateformes étant parfois élevé, cela a un impact sur la marge des artisans« , estime Jacques Chanut, président de la FFB.

Si Homly You, par exemple, facture le service à l’abonnement 29 euros par mois en échange d’un nombre minimum de mises en relation mensuel, AlloMarcel a opté, de son côté, pour le prélèvement d’une commission variable en fonction de la nature du chantier. Des options qui peuvent se révéler coûteuses alors que les artisans doivent être réactifs pour répondre aux demandes de devis.

Jacques Chanut, présidfent de la FFB

Un choix qui doit également être guidé par la qualité du service proposé. « Nous conseillons de vérifier si la plateforme procède à des contrôles lors de l’affiliation des offreurs, telles l’immatriculation au registre des métiers, les qualifications ou les assurances spécifiques« , détaille le président de la FFB. Une garantie tant pour les clients que pour les professionnels de disposer d’un service sérieux et protecteur. « La garantie de l’indépendance économique et d’approvisionnement de l’artisan ainsi que la mise en place d’un système de notation conforme à la norme NF sont également à surveiller« , ajoute-t-il.

Un secteur ubérisé ?

À l’instar des secteurs du transport ou de l’hôtellerie, révolutionnés par les nouveaux usages d’Internet, le bâtiment subit peu ou prou la même tendance. ­L’Observatoire de l’ubérisation estime aujourd’hui que 20 % du secteur est ubérisé ou en voie de l’être.

Olivier Waldin rappelle notamment que « le marché de la collecte de demandes des particuliers s’élève à environ 2,5 millions d’euros chaque année. Toutes plateformes confondues, 30 à 35 % du marché de la rénovation passe par Internet, désormais« . Un constat amplifié par l’émergence d’une nouvelle génération d’artisans, davantage sensibilisée aux usages du Web. « Les jeunes artisans ont vraiment intégré l’intérêt des plateformes pour se lancer et acquérir leurs premiers clients« , ajoute Solenne Xavier.

De même, face à la prolifération des sites de mise en relation entre particuliers sur lesquels les autoentrepreneurs proposent leurs services, les organisations professionnelles s’inquiètent de ce phénomène, les accusant de renforcer la concurrence déloyale. Une inquiétude partagée par les artisans eux-mêmes.

D’après une enquête de la FFB et Batiactu réalisée en 2017 auprès de 1 330 professionnels, plus de la moitié considèrent les plateformes comme un danger pour leur profession. En guise de réponse, les organisations se sont saisies du dossier. Si la Capeb propose une plateforme dédiée gérée par les artisans partenaires, la FFB a publié une fiche méthode déclinant les points à vérifier avant de choisir son site d’intermédiation. Des précautions qui peuvent être utiles pour ne pas déchanter.

Commentaires

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *