L’après Covid-19 : quelles mesures fiscales prendre dès à présent pour les entreprises ?
Au-delà des mesures d'urgences gouvernementales, les entreprises doivent appréhender les outils à leur disposition pour alléger leur charge fiscale et faire face au ralentissement économique post-confinement. Nous vous proposons un aperçu des mesures envisageables pour la plupart des entreprises.

Si la crise sanitaire semble maitrisée, il est probable que le ralentissement économique qu’elle a provoqué dure plusieurs mois supplémentaires. Dans un tel contexte, et au-delà des mesures fiscales d’urgence prises par le Gouvernement (report des échanges fiscales et sociales, prorogation de délais de procédures…), des arbitrages doivent être dès à présent réalisés par les entreprises pour qu’elles puissent gérer sereinement l’après-confinement.

Pour ce faire, nous vous proposons une boîte à outils fiscale afin de réduire les charges de votre entreprise et ainsi faire face à la baisse de revenus générée par le ralentissement économique.

En matière d’impôt sur les sociétés

Bien que toutes les entreprises ne soient pas dans des situations identiques face à la crise actuelle, nous avons identifié plusieurs catégories de charges fiscales qui devraient augmenter significativement pour la plupart des entreprises.

· Provisions

En premier lieu les entreprises ont la faculté d’enregistrer des provisions à la clôture de l’exercice 2020 : on sait qu’après une analyse approfondie de leur compte clients, elles pourront enregistrer des provisions pour clients douteux, pour ceux qui, trop impactés par le COVID19, ne pourront pas totalement honorer leurs dettes.

Mais, il est également possible de constater les conséquences de pertes d’activité en comptabilisant :

o Des provisions pour restructurations (arrêt d’une branche d’activité, fermeture d’un site…) pour les dépenses nécessairement entraînées par celles-ci : indemnités de rupture de contrat, coûts de déménagement, coûts de maintien du personnel …

o Des dépréciations d’actifs relatifs à des branches d’activité déficitaires si, durant l’exercice, la valeur de marché d’un actif a diminué de façon plus importante que du seul effet attendu de l’amortissement.

· Aides et prêts consentis entre entreprises

Dans ce contexte de crise, les entreprises peuvent apporter leur aide à des sociétés se trouvant en difficulté, par le recours à différents mécanismes : abandons de créances, subventions, renonciations à recettes, facturations à des prix inférieurs au marché, etc.

En principe, la déductibilité fiscale des abandons de créances pour l’entreprise qui les consent est très restrictive. Dans le contexte actuel, le législateur a assoupli ces règles de déductibilité. Ainsi les abandons de créances de loyers consentis entre le 15 avril et le 31 décembre 2020 sont déductibles du résultat imposable des bailleurs commerciaux de plein droit, sauf lien de dépendance avec le locataire.

S’agissant des prêts intra groupe, une revue interne des taux d’intérêts sera nécessaire. Compte tenu de son impact sur les taux d’emprunts bancaires et de l’apparition de prêts garantis par l’Etat, la crise peut donner l’occasion aux entreprises de modifier les taux de leur conventions de trésorerie intra groupe.

· Restructuration des groupes

A la sortie de la présente crise, il sera opportun pour les entreprises d’analyser l’opportunité de restructurer leurs activités : regroupement d’activités similaires par fusion de sociétés, ou à l’inverse séparation des activités déficitaires et bénéficiaires par filialisation, transferts d’actifs, etc. Ces opérations permettront de rationaliser l’organisation des groupes, de réduire les frottements fiscaux liés aux remontées de dividendes, ou encore d’économiser des frais de conseils. Les TUP et fusions simplifiées apparaissent les plus pertinentes du fait de la simplicité de leur mise en oeuvre et de leur faible coût.

· Déficits fiscaux

Pour nombre d’entreprises, la baisse de chiffre d’affaires provoqué par le COVID-19 générera une situation déficitaire pour l’exercice en cours. Or, une gestion optimisée des déficits fiscaux peut avoir un impact positif sur la trésorerie.

D’abord, les entreprises peuvent opter pour le report en arrière de leur déficit, afin de constater dès à présent une créance sur le Trésor qui sera imputable sur leur IS futur ou remboursable après cinq ans. Pour les entreprises qui avaient déjà une créance restituable en 2020, le Gouvernement s’est engagé à accélérer les procédures de remboursement.

Ensuite, c’est l’occasion d’analyser dans les groupes d’intégration fiscale comment intégrer des filiales déficitaires pour réduire la charge fiscale du groupe. La modification du périmètre d’un groupe intégré doit être notifiée à l’administration fiscale avant la date de dépôt de la déclaration de résultat de l’exercice précédent. Le Gouvernement a exceptionnellement reporté cette date au 30 juin 2020 pour cette année.

Enfin, dans l’hypothèse de restructuration, il faudra être vigilant au risque de perte des déficits. En effet, si le déficit fiscal d’un exercice est en principe reportable indéfiniment sur les exercices suivants, ce droit au report est définitivement perdu en cas de changement d’objet ou d’activité réelle ou de disparition des moyens de productions, qui emportent cessation de l’entreprise. En cas de fusion de sociétés ou opération assimilée, le déficit de la société absorbée, normalement perdu, peut être transféré à la société absorbante sur agrément préalable.

En matière de TVA

Une baisse de chiffre d’affaires peut amener une entreprise à avoir un montant TVA déductible supérieur à son montant de TVA collectée. Afin de soulager sa trésorerie, une entreprise aura tout intérêt à demander le remboursement du crédit de TVA correspondant. Le Gouvernement s’est engagé à ce que le traitement des demandes de remboursement des crédits de TVA soit accéléré pendant la crise sanitaire.

En matière de régimes d’imposition

Les baisses de chiffre d’affaire à prévoir pour l’année 2020 pourront peut-être permettre à certaines entreprises de repasser sous les seuils permettant de bénéficier de régimes spécifiques aux petites entreprises : régime micro, régime simplifié, franchise de TVA. Dans ce cas, ces entreprises bénéficieront de plein droit de ces régimes à partir de l’exercice 2021.

L’intérêt de ce changement de régime d’imposition est de bénéficier d’abattements forfaitaires qui peuvent être plus avantageux que le régime normal, ou de déclarer et payer la TVA par trimestre et non mensuellement ce qui allégera la trésorerie.

Nous avons présenté les mesures d’ordre général susceptibles de concerner le plus grand nombre d’entreprises. D’autres mesures peuvent être envisagées en fonction des particularités de chaque entreprise. Nous conseillons donc vivement aux entreprises de réaliser, à la sortie de cette crise, un audit fiscal afin de trouver des pistes d’allégement de la charge fiscale.

François Vignalou a rejoint le cabinet Bignon Lebray en 2019 où il intervient au sein du département de droit fiscal, département qu’il dirige. Il assiste ses clients, en conseil et contentieux, dans tous les domaines du droit fiscal et plus précisément en fiscalité des entreprises, en opérations de fusions-acquisitions et en private equity, notamment sur les sujets de management package.

Mais également

Philippe Brisson a rejoint Bignon Lebray en Février 2015 en qualité d’avocat collaborateur au sein du département fiscalité.

Il intervient en fiscalité des entreprises et des dirigeants, aussi bien en conseil qu’en contentieux, sur des problématiques nationales et internationales

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