Artisans… ne manquez surtout pas d’assurance !
De nombreuses activités artisanales sont soumises par la loi à un régime strict d'assurance, afin de couvrir les aléas qui peuvent dégrader leurs réalisations, ainsi que les dommages que l'entreprise pourrait causer à des particuliers.

Imaginez : votre entreprise de BTP vient de livrer une maison… mais soudain, une fissure apparaît, un mur se met à pencher, ou le système de chauffage ne fonctionne pas. Le client se retourne contre vous, et vous voilà condamné à lui verser des milliers d’euros ! « C’est pourquoi les tarifs que nous réclamons aux professionnels pour nos divers contrats d’assurance, même s’ils représentent évidemment une certaine dépense, sont finalement très mesurés quand on pense à l’importance du risque », explique Christophe Maubé, assureur chez Groupama.

En la matière, c’est la loi Spinetta de 1978 qui régit les obligations des artisans. « La partie la plus importante, c’est l’assurance responsabilité civile décennale », poursuit Christophe Maubé. Pour les artisans du BTP, elle est obligatoire sous peine de 6 mois de prison et 75 000 euros d’amende ! « Et puis il y a son corollaire du côté du client, la garantie décennale, couverte par l’assurance garantie dommages-ouvrage. »

Ces assurances concernent tout dommage qui atteindrait la solidité du bâtiment : une malfaçon dans la charpente, la toiture, les évacuations, les murs ou les fondations… Pour le maître d’ouvrage – votre client en tant qu’artisan du BTP – cette assurance permet d’être couvert rapidement, avant même que l’on sache exactement d’où vient le problème.

Mais pour vous, artisan, le plus important est évidemment la responsabilité civile décennale. Comme son nom l’indique, elle dure dix ans à compter de la réception du chantier. « Même si l’artisan change d’assureur au bout de quelques mois, c’est bien l’assureur désigné l’année de l’ouverture du chantier qui va devoir parer à tout sinistre pendant ces dix ans », souligne l’expert.

Des tarifs variables

Combien un artisan doit-il prévoir pour ce poste de dépense ? En fait, tout dépend… Donnons tout de suite une idée pour un cas simple : une entreprise de BTP unipersonnelle. Elle pourra généralement s’en sortir avec des cotisations annuelles de 700 à 1 500 euros, soit entre une soixantaine d’euros et 125 euros par mois. Mais ce n’est qu’une fourchette très approximative ! « Les tarifs varient en effet selon plusieurs critères », explique Fabienne Tiercelin, directrice des relations extérieures et du marketing du groupe d’assurance SMA. « D’abord le chiffre d’affaires : une entreprise avec un gros CA réalise de nombreux chantiers, donc le risque qu’un problème apparaisse est plus grand. »

À l’inverse, une petite structure a souvent une activité plus modeste, donc les tarifs lui seront plus favorables. L’expérience et la réputation de l’artisan jouent aussi : un professionnel confirmé peut s’attendre à des prix moins élevés. « Et puis, bien sûr, tous les métiers ne sont pas aussi risqués ! Un décorateur d’intérieur, ou même un électricien, entraîne moins souvent des sinistres », continue Christophe Maubé.

Des prix en fonction du métier

Les professions la plus « chères », au contraire ? « Le gros oeuvre : maçon, couvreur, charpentier », détaille Fabienne Tiercelin. Comptez 2 000 euros par an environ, voire 3 000 euros dans certains cas. Juste après arrivent l’étancheur (1 500 à 2 000 euros annuels) et le carreleur (1 200 à 1 600 euros). Puis les plombiers et les plaquistes (800 à 1 400 euros). Pour les entreprises d’isolation, la fourchette est très large (800 à 2000 euros) en raison des travaux très différents que ces sociétés peuvent être amenées à réaliser. Enfin, les peintres, les installateurs de cuisines et salles de bains ou les électriciens sont des métiers plus « économiques » de ce point de vue : une assurance ne devrait vous demander que 600 à 1 200 euros par an. Mais, rappelons-le, ce barème n’est fiable que pour une petite entreprise, typiquement une société unipersonnelle. Plus la société grossit et plus ses chantiers sont nombreux, plus le tarif augmente…

Quid des autres assurances ?

Cette assurance décennale est généralement proposée par les assureurs sous forme de « package » multirisque, avec d’autres garanties. Outre les malfaçons de structure, une construction peut aussi être affectée par des problèmes moins graves : un carrelage mal posé, une peinture qui s’écaille… problèmes qui ne relèvent pas forcément de la garantie décennale. N’oublions pas non plus la garantie de bon fonctionnement : « on l’appelle aussi garantie biennale, elle concerne les équipements comme une chaudière ou des volets roulants qui ne fonctionneraient pas ». Il existe alors des garanties spécifiques dites « intermédiaires ».

Enfin, pour l’activité de l’artisan en général, « nous proposons l’assurance responsabilité civile exploitation, encore appelée assurance responsabilité civile générale », explique Christophe Maubé. Elle n’est pas obligatoire dans le BTP mais indispensable quand même ! « Elle couvrira des incidents tels qu’un peintre en bâtiments qui éclaboussera les voitures en stationnement, ou la pollution accidentelle d’une rivière. Ou bien des accidents plus graves concernant les personnes : un sol trop glissant avec le client qui se casse une jambe, ou un ouvrier qui tomberait d’un échafaudage, avec reconnaissance de « faute inexcusable » de l’employeur. »

Attention aux risques informatiques

Outre ces ennuis classiques, d’autres risques sont souvent oubliés. « Comme le piratage, prévient Fabienne Tiercelin. À cause d’un virus, toutes vos données informatiques sont perdues à moins que vous ne payiez une rançon. Il y a aussi l’arnaque classique de l’escroc qui se fait passer pour un client dont le RIB a changé, et fait verser l’argent sur un compte à l’étranger : on voit presque un cas par semaine. » Les petites entreprises y sont très vulnérables, car elles n’ont souvent ni service informatique étoffé, ni procédures très normées. « Tout cela s’assure, et ne coûte généralement que 500 ou 600 euros par an », estime l’experte.

Enfin, ne croyez pas que seul le BTP soit concerné ! Un fabricant de sandales peut très bien se retrouver traîné en justice par des clients qui auraient développé une allergie ! « Pour cela, il n’y a pas d’obligation légale, rappelle Christophe Maubé. Mais il est fortement recommandé de souscrire une assurance de responsabilité civile générale ! »

Sachez que si vous ne trouvez pas d’assureur qui accepte de vous prendre sous contrat, vous pouvez vous adresser au Bureau central de tarification qui, à l’instar des avocats commis d’office dans les tribunaux, désignera une compagnie d’assurances qui sera obligée de vous faire une proposition.

De l’importance d’une bonne communication

« Quand les entreprises grandissent, elles embellissent leurs locaux, achètent du matériel, équipent les véhicules », note Fabienne Tiercelin. Tous ces changements doivent être signalés à l’assureur, afin d’être certain que vous soyez couvert en cas de sinistre. « Et ça peut aussi faire baisser le tarif ! Dans le cas d’un véhicule qui prend de l’âge, par exemple ».

Votre assureur pourra aussi vous conseiller des garanties auxquelles vous n’auriez pas pensé : comme l’indemnité intempéries, en cas de chantier impossible à poursuivre en raison de la météo, ou celle pour les dommages causés par un vol ou une tempête en cours de travaux chez un client.

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